L’ECHO DU REEL
Le bonheur est comme l’écho, il vous répond mais ne vient pas.
Carmen Sylvia
Alain Seban a porté un grand coup en permettant à Buren d’envahir le dernier étage du Pompidou-Metz. En un an d’ouverture, se sont déjà engouffrés 800.000 visiteurs dans ce nouveau musée, lequel, aux dires du Président, doit être propice à la remise en question.
Buren comme d’habitude a réussi sa mission, un peu trop bien même.
Contrairement à la greffe qu’il a réalisée en 2002 à Beaubourg et à la réplique intérieure du clocher du MUDAM de Luxembourg, le dispositif de Metz est loin d’être une intrusion légère et passagère. La mise en place est à ce point incrustée dans l’architecture jusqu’à l’os qu’elle donne l’impression d’avoir toujours été là. La qualité des matériaux et leur mise en œuvre, la justesse du parcours, lui donnent un caractère de pérennité absolue.
Les familles se régalent en se perdant dans les reflets des murs lisses et colorés. Lorsqu’elles s’engagent dans la salle des miroirs et débouchent sur le panoramique de la ville, l’effet de surprise est garanti. On redécouvre la vie avec plaisir. Tout le contraire des trains fantômes du Grand Palais de Paris.
C’est ici, que le piège burenien se referme. Loin des installations, qu’on relègue avec peine dans les réserves, on se retrouve en face d’un bien douloureux dilemme. Dans un si bel espace, en fin de compte, que peut-on rêver de mieux ?
De plus beau ? De plus efficace ? De plus ludique ? De plus esthétique ?
Soyons réalistes, la réponse est, je vous le donne en mille : rien d’autre. C’est le musée dans son ensemble qui est pris en otage ad vitam.
Lorsqu’on descend vers les autres salles d’exposition, on ressent vite l’évidence de ce que l’on vient de quitter. La théâtralité des longs corridors pédagogiques et leurs meurtrières inutiles devient pesante et désuète. Les chefs-d’œuvres sont pourtant bien présents sous nos yeux, mais notre attention s’est envolée, désamorcée par un décor obèse et neutralisant.
À la place d’Alain Seban, je réfléchirais à deux fois avant de procéder au démontage du dispositif de Buren. Il est d’une qualité telle que son absence n’engendrera que regrets et nostalgie.
Après le musée qui n’existait pas de Paris, Buren a commis ici un musée qui existe trop. J. CHARLIER. nov.011
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